Commune de Meynarguette -  Mairie - Garde champêtre

L’adjoint au maire a dressé un procès verbal le 2 septembre 1825 pour tentative d’assassinat avec préméditation contre Michel Pivot, fils aîné, domicilié à Marseille : il cite « la tentative manifestée par des actes extérieurs et suivie par un commencement d’exécution n’a manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté du-dit Pivot »

Revenons sur les faits :

Le 1er septembre 1825, Xavier Marchand, maçon et six de ses ouvriers, tous originaires de Signes sauf un de Rougiers, participent au transport d’une des quatre poutres destinées à deux glacières en construction sur le territoire de Meynarguette. Ils viennent de la commune de Rougiers avec un attelage de bœufs et sont obligés de passer devant la Bastide « Les Glacières » appartenant à Michel Pivot, né à Marseille, propriétaire à Meynarguette. Ce dernier s’était opposé au passage des poutres lorsque Xavier Marchand l’en avait prévenu, proposant même de le dédommager dans l’éventualité d’une détérioration du chemin. Michel Pivot aurait prétendu que si les poutres venaient à traverser sa propriété, elles lui appartiendraient de fait. Malgré ces menaces, Xavier Marchand décide de charrier ses matériaux, le garde-champêtre de Meynarguette lui ayant affirmé que le chemin était communal.

Parvenus à la limite de la propriété, objet du litige, les ouvriers s’apprêtent à transporter la poutre a dos d’hommes pour éviter toute contestation. A ce moment là, Michel Pivot sort de la Bastide, court au devant des hommes en criant :

«  Que faites-vous là, tas de canailles »

Suivent invectives et horions. Xavier Marchand renouvelle sa proposition d’un dédommagement ; en vain. Le propriétaire court alors vers sa maison et en revient aussitôt avec un fusil à deux canons. L’ouvrier Canorgues lui signale qu’il est en tort d’autant que ses collègues et lui même ne sont pas armés. Michel Pivot épaule son fusil et crie avant de tirer :

« au premier ! »

Jean Niel aurait été tué sans l’intervention de son camarade Canorgues qui détourne le coup. Canorgues est blessé légèrement au poignet. Une balle se perd dans la poutre.

Et Xavier Marchand de conclure que Michel Pivot se retire après « mille invectives contre nous ».

Le 3 septembre, Pierre Tistanier, médecin de Signes, rédige un certificat attestant que le poignet de Canorgue montre des blessures consécutives à la détonation d’un coup de fusil. Le maire de Signes parafe le certificat.

Deux pièces à conviction sont envoyées à Brignoles : le fusil double et un gilet rayé, rapiécé de velours.

Le 17 septembre, le juge de Brignoles envoie une commission rogatoire au juge de Toulon et le 30 septembre, ce dernier procède à l’interrogatoire des témoins et traduit l’affaire en justice.

Le 9 décembre, un mandat d’arrêt est signé à l’encontre de Michel Pivot. L’ordonnance d’arrêt n’est publiée et affichée que le 12 mars 1826 par l’huissier de justice de Draguignan, Jean Honoré Fabre : «  … m’étant transporté au devant de la principale porte de l’auditoire de la Cour d’Assises de ce Département, après avoir fait sonner la trompette par le nommé Louis Chaix en la matière accoutumée, j’ai lu et publié à haute et intelligible voix … ».

Suit l’accusation et l’ordre que Michel Pivot se présente dans les dix jours pour se mettre en état d’arrestation. L’huissier envoie copie de son procès-verbal à Meynarguette et le garde-champêtre reprend le chef d’accusation « après avoir battu la caisse » devant la mairie de Signes et la Bastides Les Glacières sur la porte de laquelle il placarde l’arrêté.

Le 16 mai 1826, Honoré-Esprit Gérard, président du Tribunal de première Instance de Draguignan se rend à Meynarguette pour procéder à l’interrogatoire de l’accusé. Celui-ci se déclare « marchand-glacier », né à Marseille, demeurant à Meynarguette, âgé de 36 ans. Il nie la tentative d’homicide volontaire : « voyant des inconnus sur son terrain, il les a interpellés et alors ils l’ont insulté et maltraité ». Le maire envoie un certificat certifiant «  que le sieur Pivot, fils de Jean-Baptiste Michel, s’est toujours fait remarquer par la régularité de sa conduite dans la commune et qu’il n’y ait jamais eu de plainte contre luy hors de cette pour laquelle il est appelé dans ce moment par le tribunal de Draguignan. » Le maire de Marseille adresse au président du tribunal une lettre semblable.

Les 2 et 3 juin 1826, le procès a lieu à Draguignan. Les témoins de l’accusation sont les 7 ouvriers attaqués. L’accusé a pour lui le témoignage de 5 de ses amis, originaires de Signes, Meynarguette, Nans et Gémenos. Le jury présidé par M. Layet ne retient pas l’accusation de tentative de meurtre avec préméditation. Il déclare l’accusé coupable de coups et violences contre les ouvriers qui l’auraient incité de leur côté avec des violences.

Michel Pivot a finalement été acquitté.

Pour en savoir plus, vous pouvez lire "L'affaire des puits à glace" par 'Ada et Philippe Hameau où le célèbre détective londonien Sherlock Holmes, et son fidèle Watson, sont appelés par la famille Canorgues de Signes pour résoudre une énigme policière aux glacières de l'Orphelin.